Le coaching vise à rendre le coaché autonome. Voici une phrase encore et encore répétée, et à raison d’ailleurs, tant elle est centrale, voire fondatrice pour notre approche.

Comment cette notion, élevée au stade d’objectif ultime comme sur un piédestal, pourrait-elle être nuancée ?

Le premier bémol est qu’un coaching en entreprise peut parfois viser davantage à l’augmentation de la performance qu’au développement de l’autonomie du coaché. Dans certaines situations, une autonomie ressentie comme trop forte par les supérieurs hiérarchiques du coaché peut constituer le « problème à résoudre ». Un coach peu regardant pourra œuvrer finalement dans le sens d’une baisse de l’autonomie.

Une autre nuance est le paradoxe constitutif de l’accompagnement et consistant à accompagner quelqu’un pour le rendre autonome. En arrière-plan flotte le sentiment qu’il faut dépendre d’autrui (ou en être dépendant ?) pour être autonome. Même si cette phase de dépendance n’est qu’un passage, rarement un paradoxe n’aura été aussi flagrant… 

Le dernier élément discutable autour de cette notion d’autonomie, qui est le plus important à mon avis, est qu’elle est l’otage d’une tendance sociétale. Cette autonomie devient une notion tyrannique, vers laquelle chacun doit tendre en toutes circonstances (ce qui a d’ailleurs sans doute beaucoup contribué au développement du coaching, ne crachons pas dans la soupe). 

Objectif louable et attirant s’il en est, l’autonomie a fini par devenir un devoir que tout un chacun se doit d’atteindre s’il veut se réaliser pleinement, sans quoi l’individu verrait sa vie irrémédiablement gâchée. 

Voici donc un nouveau paradoxe, plus insidieux celui-ci, rapprochant l’autonomie d’une contrainte sociale. Alors qu’elle devrait être synonyme de liberté, elle devient contrainte…

Et, en exagérant un peu, que dire d’une société où tout le monde serait totalement autonome ? Quelles conséquences cela aurait-il sur le lien et la cohésion sociale ?

Mais alors, au final, de quelle autonomie parle-t-on ? Je rejoins Max Meulemans (Master coach belge) quand il dit que « le but ultime du coach est de permettre à son client de s’affranchir de sa demande de départ ». Coach et coaché s’efforcent de travailler ensemble pour trouver un moyen de dépasser cette demande, de s’en séparer, de la voir autrement et donc finalement de s’en rendre autonome. 

En restreignant drastiquement l’étendue de l’autonomie en coaching en me centrant sur la demande, j’espère enlever un peu de pression sur les épaules du coach et du coaché qui pourraient s’épuiser en poursuivant une autonomie générale chimérique. Ils pourraient peut-être alors se sentir libérés et gagner en confort ?

Et si au final, en réduisant la portée de l’autonomie, on gagnait en autonomie ? Sur ce sujet, cela ne ferait qu’un paradoxe de plus…

Frédéric Panza, coach et formateur, juillet 2016